Du 4 au 6 septembre 2024, les dirigeants africains se rassemblent à Pékin pour le 9e Forum sur la Coopération Sino-Africaine (FOCAC). Cet événement triennal, devenu un incontournable de la diplomatie africaine, soulève toutefois des questions cruciales sur la nature et les bénéfices réels de cette relation asymétrique entre la Chine et l’Afrique. Alors que les prêts souverains chutent, la balance commerciale demeure structurellement déficitaire, et les investissements deviennent de plus en plus prudents, il est légitime de se demander si ce sommet ne sert en réalité que les intérêts chinois.
La Montée en puissance de la Chine en Afrique
Depuis 2015, la Chine a considérablement renforcé ses liens avec l’Afrique, investissant des milliards de dollars dans des infrastructures comme des routes, des chemins de fer, des ports et des parcs industriels. Pékin est devenu le premier partenaire commercial du continent, avec près de 168 milliards de dollars échangés au premier semestre 2024. Cette dynamique reflète une percée chinoise là où les puissances occidentales, jadis hégémoniques, perdent de plus en plus de terrain.
Le succès de la Chine en Afrique repose en grande partie sur des conditions de prêts attractives, souvent dépourvues de la rigueur liée aux exigences de démocratie et de respect des droits de l’homme, que les Africains trouvent trop contraignantes. La politique de « non-ingérence » de Pékin, un principe sacré pour les dirigeants africains, contraste fortement avec les politiques interventionnistes de l’Occident. Ainsi, les nouvelles offres chinoises de prêts, d’annulations de dettes et d’investissements semblent être une aubaine pour des gouvernements africains en quête de développement rapide.
Des partenariats inégaux et une dette accablante
Cependant, derrière ces apparences de coopération « gagnant-gagnant », une réalité plus sombre se dessine. Les pays africains, bien que courtisés pour leurs ressources naturelles, n’ont jamais su négocier des partenariats qui profiteraient véritablement à leur développement. Alors que la Chine investit dans des infrastructures, peu d’efforts sont faits pour transférer des technologies ou des compétences. Les Africains restent de simples consommateurs, importateurs de biens chinois bon marché, mais de qualité souvent discutable.
La question de la dette africaine vis-à-vis de la Chine est centrale. Entre 2000 et 2023, la Chine a accordé plus de 1.300 prêts à 49 pays africains, totalisant plus de 182 milliards de dollars. Bien que ces prêts aient permis de financer des projets d’envergure, ils représentent un fardeau financier croissant pour les nations africaines. La gestion de cette dette risque de compromettre la souveraineté économique du continent, et les bénéfices de ces partenariats restent incertains à long terme.
L’Afrique, toujours à la traîne
Face à cette situation, il est clair qu’aucune grande puissance, qu’elle soit chinoise, française, russe, ou américaine, ne servira le développement de l’Afrique sur un plateau d’argent. Les intérêts de ces puissances sont avant tout économiques, et tant que les pays africains ne parviendront pas à se développer par eux-mêmes, ils resteront dépendants de ces partenariats inégaux.
Enfin , le 9e sommet Chine-Afrique est une occasion pour les dirigeants africains de repenser leur stratégie de coopération avec la Chine. Plutôt que de se contenter de consommer et de s’endetter, il est temps pour l’Afrique de prendre en main son destin en valorisant ses ressources et en développant son propre potentiel industriel et technologique. Le défi est immense, mais comme le disait Joseph Ki-Zerbo, « on ne développe pas, on se développe ». C’est cette prise de conscience qui permettra à l’Afrique de sortir de l’ombre de la Grande Muraille et de tracer sa propre voie vers un développement durable et équitable.
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