Djibouti, bastion discret mais résolu du soutien à la Palestine, n’a jamais fléchi dans sa posture diplomatique. Depuis son accession à l’indépendance en 1977, la République de Djibouti a placé la cause palestinienne au cœur de son engagement international. Ce n’est ni un hasard ni une posture conjoncturelle. C’est un choix structurant, éthique, géopolitique et civilisationnel.
L’accueil dès les premières années d’une ambassade de la Palestine à Djibouti-ville en est le témoignage symbolique et politique. Sur les rives du golfe d’Aden, dans ce carrefour stratégique de la Corne de l’Afrique, la petite République assume une position de principe : la création d’un État palestinien viable avec Jérusalem-Est pour capitale, aux frontières de 1967, est une ligne rouge, une constante, une intransigeance qui ne se négocie pas.
À l’heure où une grande majorité des 54 États africains entretiennent, à des degrés divers, des relations diplomatiques, économiques ou sécuritaires avec Tel-Aviv, Djibouti fait figure d’exception absolue et assumée. Le pays n’a jamais établi le moindre contact officiel ou officieux avec Israël. Pas d’ouverture de bureau commercial, pas de tentative de normalisation, pas même de débat public ambigu sur la question. Une clarté rare dans un environnement international brouillé, où la realpolitik tente souvent d’effacer les lignes rouges idéologiques ou morales.
Aux côtés de l’Algérie, des Comores, de la Libye, de la Mauritanie, du Niger, de la Somalie et de la Tunisie ( majoritairement membres de la Ligue arabe ) Djibouti se distingue toutefois par son absence totale de fluctuations dans sa posture. Aucun rapprochement, aucune oscillation, aucun marchandage.
À l’inverse, plusieurs pays ont tenté, puis abandonné, des ouvertures à Tel-Aviv : la Mauritanie en 1999, avant de rompre en 2010 ; le Niger en 1996, avant de faire marche arrière à la faveur de la seconde Intifada ; le Mali, par épisodes, sous la présidence d’IBK. Tous ont été rattrapés par le poids de leurs opinions publiques, de leurs héritages politiques ou de leurs appartenances régionales.
En effet, ce positionnement s’enracine dans l’identité même de Djibouti. Situé à la jonction du monde arabe et de l’Afrique subsaharienne, dans un espace afro-arabe, le pays articule son engagement régional à une diplomatie de principes. La société djiboutienne s’identifie profondément au destin du peuple palestinien, perçu comme le miroir tragique d’un monde arabe blessé et fragmenté. Ce sentiment transcende les clivages politiques ou générationnels. Il irrigue les discours officiels comme les conversations populaires. Dans les quartiers de Djibouti-ville, dans les prêches du vendredi, dans les fresques murales, dans les mobilisations de la société civile ou les prières de l’Aïd, la cause palestinienne demeure omniprésente, presque consubstantielle à la conscience nationale.
Djibouti adhère pleinement à l’Initiative de paix arabe proposée par l’Arabie Saoudite en 2002, initiative qui conditionne toute normalisation avec Israël à un retrait total des territoires occupés et à la reconnaissance d’un État palestinien dans les frontières de 1967. Pour Djibouti, cet engagement n’est pas qu’une ligne diplomatique : il est un étalon moral, un rappel de l’exigence de justice dans un ordre international souvent cynique.
Dans toutes les enceintes régionales ou internationales, que ce soit au sein de la Ligue arabe, de l’Union africaine ou à l’ONU, la voix de Djibouti reste constante, alignée, sobre mais ferme. Pas d’ambiguïté, pas de glissements. La solution à deux États n’est pas un luxe négociable, mais une nécessité historique.
Alors que certains pays, y compris dans le Golfe, ont fait le choix d’une normalisation rapide avec Israël, souvent au nom d’intérêts économiques ou de convergences géostratégiques anti-iraniennes, Djibouti campe sur une position qui tranche par sa constance. Aucun opportunisme conjoncturel n’est venu diluer sa ligne. La Palestine n’est pas une carte à jouer, mais une cause à défendre. Cette posture s’inscrit dans une vision plus large de la diplomatie djiboutienne, articulée autour de la souveraineté, de la solidarité régionale, du dialogue inter-civilisationnel, et d’un refus clair des logiques de domination. En refusant toute tentative de normalisation avec Israël tant que le peuple palestinien reste privé de son droit à l’autodétermination, Djibouti renforce sa crédibilité diplomatique et affirme son indépendance stratégique.
Il serait erroné de croire que cette position est seulement celle de l’élite dirigeante. L’adhésion de la population djiboutienne à la cause palestinienne est large, viscérale, constante. Elle transcende les affiliations partisanes. Les jeunes générations, à l’ère des réseaux sociaux et des chaînes satellitaires, restent très sensibles à la question palestinienne, perçue comme l’ultime front de résistance contre l’injustice historique.Les vagues de solidarité, les collectes, les rassemblements spontanés à Djibouti-ville lors des bombardements à Gaza ou des affrontements à Al-Aqsa témoignent de cette conscience vive. La Palestine n’est pas un “dossier diplomatique” à Djibouti. C’est une part de l’âme collective.
Alors que le Proche-Orient se recompose, que les alliances se défont et se refont, Djibouti demeure un repère de constance, une petite nation par la taille mais grande par la clarté de ses engagements. Loin des postures tapageuses ou des renoncements dissimulés, Djibouti maintient une ligne droite, silencieuse mais ferme, fidèle à l’idée que la justice ne se mesure pas à la puissance des États, mais à la cohérence des principes.
Dans ce monde fragmenté, il est des postures diplomatiques qui ne s’achètent pas. La solidarité avec la Palestine, à Djibouti, ne relève pas d’un calcul. Elle relève d’une fidélité.
Et le leadership du président Ismaïl Omar Guelleh en est l’artisan central. Depuis plus de deux décennies, le chef de l’État incarne cette ligne constante, sans faille, sans égard, sans compromis. Il a su ancrer la cause palestinienne au cœur de la diplomatie djiboutienne comme une boussole morale, une ligne rouge qui ne se négocie ni sous la pression, ni sous les promesses. À rebours des virages opportunistes et des reconfigurations d’intérêts, le président Guelleh a maintenu le cap, avec clarté et courage, dans un monde où la fidélité aux principes devient de plus en plus rare.
À Djibouti, la solidarité avec la Palestine est une politique d’État. Sous l’impulsion du président Guelleh, elle est devenue une politique de conviction.
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