Sous le soleil doux d’un début de matinée, les portes du Centre national des archives se sont ouvertes, non seulement physiquement, mais symboliquement, sur une nouvelle ère : celle d’une mémoire accessible, inclusive et vivante. À l’occasion de la Semaine Internationale des Archives (SIA25), Djibouti a accueilli une série de rencontres axées sur un thème à la fois technique et profondément politique : « Archives accessibles ; Des archives pour tous ( tes )».
Au-delà des discours, la journée du 9 juin a donné chair à une réflexion nationale sur l’égalité d’accès au savoir historique, en réunissant experts, chercheurs, médiateurs culturels, personnes en situation de handicap et citoyens dans un même espace de dialogue. Objectif commun : faire des archives un bien public, partagé et compréhensible par tous.
L’ouverture de la journée a été marquée par l’intervention remarquée de Mme Sagal Rachid, archiviste de renom, autour de la question centrale : « Préserver pour rendre accessible ». Devant un auditoire attentif, elle a rappelé que « l’archive n’est pas un vestige du passé figé, mais un instrument de justice sociale ».
Conserver, oui ; mais pour transmettre, pour raconter, pour donner des clés de lecture à ceux qui, souvent, en sont exclus.
Moment phare de cette journée : une table ronde ouverte, riche en témoignages, confrontations et perspectives. Le panel, volontairement diversifié, a permis de croiser les regards professionnels, militants et citoyens :
• Dr Djama, historien, a déploré la fracture entre savoir académique et public populaire.
• Liban Iltireh, médiateur culturel, a insisté sur la nécessité de vulgariser l’histoire sans la trahir.
• Kaltoum Mohamed Abdi, intervenante au nom des personnes en situation de handicap, a livré un plaidoyer poignant : « Nous avons aussi droit à notre mémoire. Pas demain. Maintenant. »
Ainsi , des échanges francs ont permis d’identifier les verrous systémiques à lever :
1. Des infrastructures vieillissantes, peu adaptées à la consultation publique.
2. Une numérisation embryonnaire, freinant l’accès pour les chercheurs éloignés ou les jeunes générations connectées.
3. Une barrière linguistique persistante : peu de ressources en somali, afar ou arabe.
4. Une quasi-invisibilité des personnes en situation de handicap, dans les dispositifs comme dans les contenus.
Plutôt que de s’arrêter au constat, les intervenants ont esquissé une feuille de route ambitieuse :
• Lancement d’un plan d’accessibilité globale, mêlant normes techniques, innovations linguistiques et plateformes numériques.
• Accélération de la numérisation, avec intégration de l’intelligence artificielle pour l’indexation et la traduction automatique.
• Création de pôles d’archives régionales, afin de rapprocher les documents des communautés locales.
• Valorisation des savoirs oraux, souvent négligés, à travers des projets participatifs intergénérationnels.
• Implication des citoyens, notamment les jeunes, dans la co-construction de la mémoire nationale.
Au fil des échanges, une idée a émergé avec force : les archives ne sont pas seulement l’affaire d’experts, elles sont le socle d’une conscience collective, d’un dialogue intergénérationnel, d’un futur enraciné dans le réel. À l’issue de la journée, les participants ont formulé un appel à l’action : faire de l’accessibilité des archives un axe stratégique des politiques publiques, au même titre que l’éducation ou la santé.
En filigrane de cette journée, une conviction : ouvrir les archives, c’est ouvrir les possibles.
Et à Djibouti, cette ouverture n’est plus une promesse lointaine. Elle s’écrit, dès maintenant, à plusieurs voix.
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