Dans une mise en scène maîtrisée aux accents à la fois solennels et spectaculaires, le président Donald Trump a accueilli ce mercredi à la Maison-Blanche cinq chefs d’État africains. Une rencontre qualifiée par ses conseillers de « mini-sommet stratégique », articulée autour de la diplomatie transactionnelle chère au locataire du Bureau ovale, avec en toile de fond les opportunités commerciales sur le continent africain.
Autour de la grande table ovale, les présidents du Sénégal (Bassirou Diomaye Faye), du Gabon (Brice Clotaire Oligui Nguema), de la Guinée-Bissau (Umaro Sissoco Embaló), du Liberia (Joseph Boakai) et de la Mauritanie (Mohamed Ould Ghazouani) ont répondu présent à l’invitation de Washington. Tous ont en commun d’être à la tête de pays riches en ressources naturelles convoitées, notamment en minerais stratégiques.
Il s’agit de la première initiative d’envergure du président Trump à l’égard du continent depuis son retour à la Maison-Blanche en janvier 2025. Une reprise de contact qui tranche avec l’approche plus institutionnelle de ses prédécesseurs. Cette fois, il s’agit moins de partenariats multilatéraux que d’accords bilatéraux orientés vers l’investissement privé américain.
Washington assume une approche pragmatique, voire brutale : moins d’aide publique au développement, plus de deals économiques. La priorité est claire : sécuriser l’accès aux ressources africaines, contenir l’expansion chinoise, et réaffirmer l’influence américaine sur un continent de plus en plus convoité.
Devant les caméras, Donald Trump a multiplié les signes d’attention. Il a salué avec enthousiasme le « parcours remarquable » du président sénégalais Bassirou Diomaye Faye, soulignant son jeune âge apparent et la « résilience » dont il aurait fait preuve face à « l’injustice de l’ancien gouvernement ». Une déclaration aux airs de flatterie calculée, qui n’a pas manqué de faire réagir sur les réseaux sociaux sénégalais.
Mais le moment le plus commenté reste sans doute son échange avec le président du Liberia, Joseph Boakai. Le chef de l’État américain, visiblement mal informé, lui aurait lancé : « Où avez-vous appris l’anglais ? Votre anglais est excellent. » Une phrase accueillie avec un sourire poli de son interlocuteur… mais qui a immédiatement provoqué un tollé en ligne. Rappelons que l’anglais est la langue officielle du Liberia depuis plus de deux siècles. Un impair qui illustre les limites de l’approche parfois improvisée de Donald Trump sur les questions internationales.
Au-delà de l’image, cette réunion revêt une forte dimension politique. Donald Trump, en quête d’un second souffle international et de succès diplomatiques à valoriser en campagne électorale, cherche à se repositionner comme faiseur de paix et catalyseur d’affaires. Et les présidents africains ne sont pas en reste : leur présence à Washington leur permet de renforcer leur stature internationale et d’espérer des retombées économiques concrètes.
Le président gabonais Brice Oligui Nguema a même suggéré, à demi-mot, une candidature de Trump au prix Nobel de la paix. « Il le mérite », a-t-il lancé, dans une ambiance bon enfant, rapidement relayée par les médias conservateurs américains.
Si la rencontre s’est déroulée dans une atmosphère cordiale, certaines tensions n’ont pas pu être complètement éludées. Parmi elles, la réduction annoncée de l’aide américaine à l’Afrique et la politique migratoire restrictive de l’administration Trump, qui cible notamment des ressortissants africains. Plusieurs sources évoquent la possible extension des interdictions de visa à de nouveaux pays, un sujet sensible que les dirigeants présents auraient abordé à huis clos.
Face à ces défis, les présidents africains invités cherchent à composer. Ils veulent à la fois capitaliser sur la dynamique commerciale initiée par Washington, tout en préservant leur autonomie diplomatique. Un jeu d’équilibriste délicat, dans un contexte international marqué par la compétition entre grandes puissances.
Et après ?
Ce mini-sommet pourrait être le prélude à un rendez-vous plus large : un sommet États-Unis–Afrique est évoqué pour septembre prochain, en marge de l’Assemblée générale des Nations unies à New York. Une manière pour Trump de s’ancrer durablement dans la diplomatie africaine, à sa façon.
Entre séduction assumée, maladresses protocolaires et priorités économiques affichées, l’Amérique de Donald Trump revient en Afrique non pas avec des promesses d’aide, mais avec des propositions de contrats. Reste à savoir si les dirigeants africains y trouveront leur compte.
Avec ce sommet aux allures de tractation, le président Trump pose les jalons d’une politique africaine résolument orientée vers les affaires ; quitte à heurter certaines sensibilités. Une diplomatie de deals, plus que d’égards.
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