mardi 28 mai 2024

Les États-Unis désignent le Kenya comme allié majeur non-OTAN : un tournant dans les relations bilatérales et la politique africaine de Biden


 Le 23 mai, alors que le président américain Joe Biden accueillait son homologuekenyan, William Ruto, pour une visite d'État, la Maison Blanche a franchi une étape importante dans la consolidation des relations bilatérales entre les États-Unis et le Kenya, vieilles de 60 ans. En s'engageant à désigner le Kenya comme un allié majeur non membre de l'OTAN, une première pour un pays d'Afrique subsaharienne, les États-Unis ont envoyé un message de confiance retentissant dans la région. 



Cette décision cruciale renforce non seulement la stature du Kenya en tant qu'allié clé des États-Unis, mais marque également un tournant dans la politique chancelante de l'administration Biden à l'égard du continent, fondée sur l'idée que les États-Unis doivent être guidés par leurs partenaires. Les acteurs régionaux en Afrique gravitant autour du multilatéralisme par le biais du bloc BRICS dirigé par la Chine et la Russie, les États-Unis se sont retrouvés sur le reculoir, en particulier à la lumière du soutien de l'Afrique du Sud à la Russie dans la guerre en Ukraine et de l'opposition à la politique américaine sur la guerre à Gaza.


L'influence de la Russie n'a cessé de croître en Afrique de l'Ouest et au Sahel, la junte nigérienne ayant chassé les troupes américaines malgré la construction par Washington d'une base de drones d'une valeur de plus de 100 millions de dollars pour contribuer à la lutte contre le terrorisme et la fourniture d'une assistance militaire. Même Djibouti, où se trouve la principale base du Commandement américain pour l'Afrique dans la Corne de l'Afrique, a refusé d'autoriser les forces américaines à lancer des frappes depuis son territoire contre les Houthis, alors que ces derniers continuent d'attaquer des navires commerciaux en mer Rouge. Mais en cette période d'incertitude, les États-Unis ont trouvé un soutien solide au Kenya, et il est clair que leur partenariat avec Nairobi s'étendra bien au-delà du continent africain.

Le Kenya a soutenu les États-Unis dans les moments difficiles, notamment lors de l'invasion massive de l'Ukraine par la Russie en 2022, en participant au groupe de contact pour la défense de l'Ukraine et en respectant les sanctions imposées par les États-Unis à l'encontre de la Russie, même au prix de millions de dollars de pertes commerciales et d'inquiétudes quant à la sécurité alimentaire. Le Kenya a également montré son engagement en faveur de la sécurité mondiale en déployant 1 000 policiers des forces spéciales en Haïti pour diriger une mission internationale soutenue par les Nations unies et en rejoignant l'opération Prosperity Guardian, l'effort multinational de sécurité maritime mené par les États-Unis et formé en décembre 2023 pour répondre aux attaques des Houthis sur le trafic de la mer Rouge.


En revanche, Djibouti, qui était autrefois considéré comme un élément clé de la guerre contre le terrorisme menée par les États-Unis, est devenu leur partenaire le moins fiable dans la région. En témoigne son mépris des préoccupations américaines, comme le fait d'avoir permis à un navire espion iranien d'accoster au large de la côte depuis une base militaire chinoise à Djibouti, ce qui aurait pu fournir des informations vitales aux Houthis. Le manque de coopération de Djibouti n'a fait que souligner davantage la position du Kenya en tant que partenaire régional fiable et digne de confiance.

Les plans initiaux des États-Unis visant à établir une base militaire à Berbera, au Somaliland, ont été contrecarrés en raison de la guerre par procuration que la Somalie mène actuellement contre le Somaliland. Cette situation résulte de l'échec de la politique africaine du président Biden, qui privilégie une approche "une seule Somalie" par le biais d'efforts "menés par des partenaires et soutenus par les États-Unis", encore compliquée par l'accord d'accès maritime entre l'Éthiopie et le Somaliland. Avec l'expulsion imminente des troupes américaines du Niger, le Kenya est l'option la plus économiquement et politiquement réalisable pour les reloger. En effet, le président Biden semble avoir déjà pris une mesure proactive à cet égard en créant une nouvelle base militaire dans le comté de Wajir, au Kenya, à côté de la base existante de Manda Bay, pour les accueillir. L'Afrique subsaharienne étant confrontée à de nombreux défis en matière de sécurité, qu'il s'agisse de la guerre civile en cours au Soudan, de la paix précaire en Éthiopie ou de l'instabilité en République démocratique du Congo, en Afrique de l'Ouest ou au Sahel, l'importance du Kenya en tant qu'allié majeur non membre de l'OTAN et partenaire régional fiable ne saurait être surestimée.

À l'avenir, le président Ruto devra gérer des questions aussi variées que le retrait de la mission de transition de l'Union africaine en Somalie et la résurgence potentielle d'Al-Shabaab qui en résulte, gérer les factions en guerre au Congo, trouver une solution gagnant-gagnant à la question de l'accès maritime de l'Éthiopie pour régler son différend avec la Somalie, gérer l'alliance délicate entre la Somalie et la Turquie, et faire face à la guerre civile en cours au Soudan - sans parler de l'incertitude qui plane sur les prochaines élections américaines de novembre. Alors que nous entrons dans un monde multipolaire, M. Ruto doit manœuvrer habilement entre les tensions géopolitiques, les guerres commerciales imminentes et la menace toujours présente de l'influence russe et iranienne dans la Corne de l'Afrique. Alors qu'il s'efforce de relever cette myriade de défis et de s'adapter aux complexités de la politique de l'Afrique subsaharienne, il n'y aura probablement pas de hakuna matata.



Par Gouled Ahmed , analyste politique de  Middle East Institut   

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