vendredi 25 avril 2025

Le Salon du Livre de Djibouti, itinéraire d’une influence littéraire et culturelle en pleine expansion.

 En trois éditions seulement, le Salon du Livre de Djibouti s’est imposé comme bien plus qu’un simple événement culturel : une tribune d’idées, un levier de soft power et un carrefour des littératures de la Corne de l’Afrique. Porté par une volonté politique affirmée et une dynamique citoyenne, ce rendez-vous annuel a su transformer le livre en instrument de dialogue, d’émancipation et de rayonnement régional. Retour sur une success story qui dessine les contours d’une ambition culturelle djiboutienne.  



Lancé en avril 2023 sous le haut patronage du président Ismaïl Omar Guelleh, le Salon naît avec une ambition claire : faire du livre un « trait d’union » dans une région marquée par les tensions. Le choix de la Somalie comme invitée d’honneur n’est pas anodin. À travers des débats sur la paix et des rencontres avec des auteurs comme Omar Youssouf Ali, cette première édition pose les bases d’un projet à la fois culturel et politique. Le décret présidentiel n°2023-337 officialise le Salon comme événement national, marquant une étape décisive dans l’institutionnalisation de la vie littéraire djiboutienne.  


Un an plus tard, le Salon opère un virage stratégique en plaçant les jeunes au cœur de sa programmation. Sous le thème « Littérature des jeunesses : de l’oralité à l’écriture », l’édition 2024 célèbre les nouvelles formes de création, du manga au slam, tout en honorant l’héritage des contes traditionnels. L’Éthiopie, invitée d’honneur, symbolise l’ancrage régional de l’événement. Avec le soutien de l’OIF et de l’UNESCO, le Salon s’exporte hors des murs de Djibouti-Ville grâce à une « Caravane du Livre », touchant des publics éloignés. Une génération de jeunes djiboutiens découvre alors le pouvoir de l’écrit.  


En 2025, le Salon franchit une nouvelle étape en associant littérature et engagement. L’invitation de la Palestine, dans un contexte de crise régionale, donne une résonance politique aux discussions. Des lectures publiques, des débats sur la résistance par les mots et une présence accrue de formats innovants (podcasts, livres audio) enrichissent l’événement. Le commissaire général Omar Youssouf Ali et l’ambassadeur Ahmed Araïta Ali y voient une confirmation : le Salon est désormais une plateforme où la culture rencontre la diplomatie.  


Aujourd'hui, le Salon du Livre de Djibouti s'appuie sur trois fondements essentiels qui en font bien plus qu'un simple événement culturel. Le premier pilier est celui de la diplomatie culturelle , où le livre devient un instrument de dialogue et de rapprochement. En invitant des pays voisins comme la Somalie et l'Éthiopie, ou des nations symboliques à l'instar de la Palestine, Djibouti transforme son Salon en une tribune de soft power, favorisant les échanges interculturels et renforçant son rôle de médiateur dans la région.  


Le deuxième pilier repose sur l'éducation populaire , faisant de cet événement une véritable « école hors les murs ». Grâce aux ateliers d'écriture, aux caravanes du livre itinérantes et aux rencontres scolaires, le Salon touche un public varié, en particulier la jeunesse, tout en valorisant les langues locales et les traditions orales. Ces initiatives contribuent à démocratiser l'accès à la lecture et à stimuler la création littéraire chez les plus jeunes.  


Enfin, le troisième pilier est celui de l'économie du livre , encore naissante mais prometteuse. Le Salon a permis l'émergence d'un marché local, encouragé par des coéditions régionales et des partenariats internationaux. Bien que modeste, cette dynamique ouvre des perspectives pour les auteurs, éditeurs et libraires djiboutiens, posant les bases d'une véritable filière du livre dans le pays.  



Le Salon du Livre de Djibouti a d’ores et déjà marqué l’histoire culturelle du pays. En trois ans, il a fait émerger une nouvelle génération d’écrivains, stimulé la création de maisons d’édition locales et brisé l’isolement des auteurs djiboutiens, autrefois contraints de publier à l’étranger. Cette dynamique a nourri une fierté créative et ouvert des perspectives inédites.  


Pourtant, pour transformer cet essor en héritage durable, trois défis majeurs doivent être relevés. Premièrement , le financement : associer davantage le secteur privé et tisser des partenariats internationaux pérennes. Deuxièmement , l’élargissement de la portée : développer une plateforme numérique pour prolonger l’expérience du Salon et créer des antennes régionales au-delà de la capitale. Enfin , la professionnalisation de la filière : former éditeurs, libraires et auteurs, tout en renforçant les réseaux collaboratifs pour ancrer une production littéraire viable.  


Les obstacles restent tangibles ( coût élevé de l’impression, accès limité aux livres, faible pénétration de la lecture ) mais les solutions s’esquissent : rendre le livre plus abordable, densifier les bibliothèques publiques et cultiver le goût de lire dès l’enfance.  


Au-delà d’un événement culturel, le Salon incarne désormais un projet de société. Il prouve que la culture peut être un ciment face aux fractures, un outil d’émancipation pour la jeunesse et un levier d’influence pour un pays aux grandes ambitions. Dans une région en quête de récits fédérateurs, Djibouti écrit une nouvelle page de son histoire : celle où le livre devient synonyme de lien, de lumière et de développement partagé.  


 

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